LAM WE NU KAWULUXE
(Les héritiers du griot)
LAM WE NU KAWULUXE propose une expérience immersive rassemblant des récits issus des dynamiques contemporaines, à travers la matérialité du coton.
En Afrique de l’ouest, l’arbre à coton a fait naître l’art du tissage au sein des peuples mandingues. Dans les sociétés traditionnelles bambara et malinké, le métier à tisser est même conçu comme une adaptation de la morphologie et de la spiritualité de la personne. Chez les Sérères, la tradition de filer le coton à la main – du nom mandingue Falé – s’est accompagnée d’innovations vernaculaires telles que le niagal, un talc fabriqué à partir de coquilles d’huitres permettant de polir le fil. En outre, les fibres naturellement ocre, marron ou vert du cotonnier ont aussi fécondé les techniques de broderie des artisans haoussas, avant même l’usage de teinture végétale ou de la soie importée.
Ces savoir-faire, jusqu’alors transmis de génération en génération par le biais de la tradition orale, se fondent et disparaissent dans le décor universel imposé par les acteurs dominants de la mondialisation. Le contexte africain postcolonial est profondément marqué par une dévaluation techno-culturelle mettant à mal le riche réservoir de connaissances toujours présentes au sein des patrimoines matériel et immatériel.
Traversant des espaces mémoriels et géographiques, de Djilor à Mar lodj, en passant par Simal puis Diofior, la hutte en cotonnier imaginée par Fatim Soumaré s’est construite entre les mains d’une centaine d’artisanes sérères. Au sein de cette sculpture collaborative monumentale, s’opère une mise en dialogue sensible avec les sculptures tissées par l’artiste. Ses «fragments de mémoire» se réintègrent sur des toiles d’emballage de coton brut sénégalais, recyclées et retapées au fil Falé, cherchant ainsi à former une pensée décentrée. Ce alors que la société nationale cotonnière sénégalaise appartient encore aujourd’hui à l’opérateur agro-industriel français fondé durant la colonisation.
Feuilles tombées des arbres du Sine Saloum, vidéo et son viennent compléter cette installation, une invitation à plonger dans une réflexion libre et délibérément ancrée dans nos modes de pensée africains.